Week-end ski alpi en Dévoluy

02 & 03/04/2022

Il faut savoir qu’au GFHM il y a 2 équipes différentes : les mordues du rocher et les fondues du ski. Suivant les saisons, les envies prennent le dessus, et clairement en ce mois de mars printanier le ski perd peu à peu ses adeptes à la faveur de la chaleur accueillante des falaises, malgré quelques irréductibles qui ont du mal à troquer les chaussures de ski contre les tongs.

Mais voilà la météo n’en fait qu’à sa tête et miraculeusement la neige est de retour, pile poil pour le week end ski alpi, qui se fera à 4 : Maria, Lulu, Cha et Elo encadrées par Max. Le suspense est à son comble, qu’est-ce que nous allons bien pouvoir faire ce premier week-end d’avril, avec des conditions dignes de janvier : gros cumuls, vent et froid sont annoncés. La sentence tombe : non nous n’irons pas nous dorer la pilule dans le Sud mais nous partirons à l’attaque du Dévoluy et de ses fameux chourums ! L’idée nous emballe car nous en avons parlé plusieurs fois ensemble et puis quand on y pense dans une grotte il ne neige pas, donc pas besoin de prévoir un parapluie pour se protéger des intempéries.

Jour 1 : La traversée héroïque où comment faire de la spéléologie en ski de randonnée.

Bon okay, il faut se mettre à l’évidence : à 5 avec des skis et des cordes il faut un compresseur pour nous faire rentrer dans une seule voiture, ou alors il faudrait se trouver une limo 4×4 floquée GFHM. Nous partons donc en convoi de 2 voitures affronter la route blanchie par la tempête de neige. Au fur et à mesure des km de goudrons avalés le temps s’éclaircit, miracle nous allons avoir du soleil ! Le Dévoluy dévoile enfin ses secrets.

L’arrivée au parking signifie debrief : nous sommes seuls, il fait froid, bon la neige n’a pas été abondante dans le coin il va falloir se résigner pour les virages carte postale, le temps est clément même si à la vitesse où fusent les nuages aux dessus de nos têtes on se doute qu’il va falloir fermer la bouche si on ne veut pas se faire déchausser toutes nos dents. Max insiste grandement sur la frontale, outil indispensable pour la sortie d’aujourd’hui. Habituées aux plans farfelus de nos guides préférés on sent la journée qui va se terminer dans la nuit noire, stalactite pendouillante au nez.

Nous partons ski aux pieds du parking direction le chourum de la traversée héroïque, la montée passe vite et nous nous retrouvons en visu de cette grotte atypique de rocher jaune. En fait grosso modo il y des trous partout ici : des petits, des gros, des traversants, si les grottophiles cherchent un paradis, c’est le Dévoluy. Nous troquons donc les spatules pour les crampons et nous attaquons la grotte : invasion du GFHM en cours. Tout est sec, rendant la grimpe plus compliquée dans la première longueur : ce n’est plus du ski mais de l’alpi hivernal ! Cette grotte en forme de tête d’alien, ovoïde avec des yeux immenses qui scrutent le ciel, est déstabilisante. Un empilement de rocher jaune et de neige blanche qui se descend même à ski quand le manteau est plus fourni, nous avons clairement atterri dans un autre univers. Entre manip de cordes, relais, pose de main courante et évolution en corde tendue, nous révisons nos basiques !

Ambiance dans la première longueur – © GFHM

A la sortie du chourum, l’exploration des grottes locales n’est pas terminée. A l’attaque de la descente, première surprise avec Maria qui se retrouve la jambe dans un trou (n’oublions pas sa taille mannequin avoisinant le mètre 90, ce n’est donc pas un petit trou dont on vous parle). Cela nous rappelle qu’il n’y a pas que sur les glaciers qu’il faut se méfier des ponts de neiges. Remises de nos émotions, nous suivons un Max cachotier qui nous conduit à l’entrée d’une mystérieuse entrée creusée dans la neige. Skis et sacs à la main nous nous faufilons dans ce tunnel : invention du spéléoski !

Max et ses endroits cachés du Dévoluy – © GFHM

Un peu rassurées sur l’utilité des frontales qui n’étaient donc pas là pour nous sauver la mise lors d’un retour tardif mais pour nous faire admirer de stalactites de glace, nous nous mettons en configuration descente. Pas de poudre en perspective mais du ski technique avec une neige changeante pas évidente à aborder. Il faut se la jouer souple sur les appuis et ne pas oublier de fermer la bouche car la neige glacée ne fait pas de cadeaux. Tiens d’ailleurs, Elo qui a tendance à faire un peu trop la maligne se retrouve sur le dos après un virage mal négocié : chute impossible à rattraper il a fallu choisir entre l’arrêt sapin ou tortue.

Retour au parking, nous reprenons la route direction le gîte de Saint Didier où nous passons une soirée dans le confort : douche, super repas, cramage au bord du poêle, c’est le grand luxe ! Ça y est, il est temps de planifier la sortie du lendemain. Notre objectif est le Chourum Olympique : un enchaînement technique de deux grottes dans les barres rocheuses de la face Est du Grand Ferrand. Nous prenons le temps de bien étudier la météo, en essayant de choisir le modèle de prévision le plus fiable en comparant les données théoriques et terrain observées durant la journée. Les différentes prévisions sont plutôt concordantes : des éclaircies le matin nous laisseront le temps de réaliser la course sous condition d’un départ très matinal (5h du parking) mais il faudra faire attention car des orages arriveront dans l’après-midi. En parallèle, le BERA est mitigé, les accumulations de neige dues au fort vent des derniers jours sont piégeuses en face Est, il faudra donc bien prendre le temps d’étudier le terrain avant de se lancer. En effet, la présence de barres rocheuses rend le parcours exposé et particulièrement dangereux en cas d’avalanches.

Allé zou, au lit !

Jour 2 : Chourum olympiques et bonhomme de neige

Comme d’habitude le réveil matinal est difficile. Heureusement nous sommes motivées par le café chaud et la course qui nous attend. Sans perdre de temps, nous nous entassons dans le 4×4 de Maria avec Max aux commandes. L’objectif est de monter jusqu’à la cabane de chasse en voiture pour gagner 200 mètres de dénivelé à pied sur une piste. En pilote aguerri, Max nous conduit juste en dessous du chalet de chasse, objectif de départ. De grosses accumulations de neige ventée sur la route nous empêchent cependant d’atteindre celui-ci. Nous laissons donc la voiture sur la piste, chaussons les skis et partons : quelle efficacité nous sommes pile poil dans les temps !

Petite blague, ceci est un faux départ : nous finissons par déneiger complètement la piste à l’aide de nos muscles surentraînés, redescendre quand même 10 min en marche arrière, nous rendre compte que nous avons oublié les clés de l’autre voiture dans un sac devant la cabane, remonter la piste en 5ème vitesse, récupérer la clé, réussir finalement à faire un demi-tour, redescendre en 8ème vitesse au gite récupérer l’objet du délit dans ladite deuxième voiture et refaire le chemin jusqu’à la fameuse cabane.

La cause de tout ce tintamarre : un DVA défectueux détecté lors du check groupe, oupsy. Cependant il est impensable de faire la course sans car c’est un outil de sécurité indispensable et il manque la pièce pour passer en mode recherche. Mais coup de chance nous en avons un de rechange dans nos affaires au gîte.

Résultat des courses : Un faux départ parfaitement réglé, et une heure de retard au chrono… Mais l’esprit de groupe, l’adrénaline et l’envie de voir ces chourums de nos propres yeux nous aident à garder le moral et nous partons finalement en direction de notre objectif.

La recherche d’itinéraire n’est pas facile ce matin, le brouillard est fortement présent et bien plus haut que prévu. Nous nous aidons des cartes et des points de repères que l’on devine pour éviter les zones de pièges que forment des chourums verticaux et nous diriger vers la bonne direction.

Soleil et vue dégagée  – © GFHM

Au bout de deux heures d’ascension nous avons enfin le droit à une éclaircie et nous nous émerveillons des paysages alentours : dolomitiques ! Le rocher jaune du Dévoluy est superbe et l’ambiance laiteuse couvre le tout d’un voile rêveur.

Répit météo avant de faire demi-tour- © GFHM

Nous arrivons enfin face au chourum olympique, malgré le fort vent glaçant il est essentiel de prendre un moment pour la décision de se lancer dans la partie technique : c’est un point décisionnel. L’objectif est d’être efficaces et pertinentes : observation de la situation, confrontation avec les données théoriques, notre ressenti, étude des risques et des différentes possibilités qui s’offrent à nous.

Au bout de 10 minutes nous avons tranché : les chourums ce sera pour une autre fois. En effet, ce que nous observons depuis le départ concorde avec le BERA annoncé : de fortes accumulations de neige sont présentes en face Est, résultat du vent ressenti hier. De plus, la météo de la journée est alignée avec les pires prévisions des modèles, laissant présager des intempéries dès le début d’après-midi. Et finalement, à cause de notre faux départ nous avons plus d’une heure de retard sur le planning.

Petite déception pour le groupe, mais ce n’est pas grave nous avons une stratégie de repli : c’est le moment idéal pour découvrir la construction d’igloo, abris de secours qui peut être utile en cas de problème. Nous redescendons sur un replat à l’abri du vent et nous nous lançons dans le défi de Max : la cahutte doit être construite et aménagée en 20 minutes top chrono. Très efficace pour se réchauffer et finalement on s’y sent même super bien pour faire la sieste !

Igloo en cours, ça réchauffe ! – © GFHM

Le retour au parking en fin de matinée se fait en slalomant entre les cailloux, les semelles n’en sortent pas toutes indemnes… Nous profitons de notre après midi pour faire un gros debrief du week-end et notamment des prises de décisions autour de café et viennoiseries dans une boulangerie. Le bilan est super positif car nous avons été mises face à la difficulté et la méthodologie du choix, essentielle en montagne. Et puis comme d’habitude avec le GFHM on a passé la sortie à se marrer et à se raconter des histoires. Une chose est certaine : Dévoluy prépare toi car l’année prochaine on revient t’embêter et explorer tes montagnes ! 

Nous apprendrons qu’une avalanche a emporté des skieurs dans la face des chourums le lendemain de notre renoncement, heureusement sans faire de blessés. Étrange sentiment de réaliser l’importance de la connaissance du terrain dans lequel nous évoluons mais surtout des outils que nous avons à disposition comme les formations, le BERA, la météo, les méthodes de prise de décision.

Charlotte, Maria, Lucille et Élodie

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