Expédition Pyrénées – Ou pas

18.05.2023-02.06.2023

Tout avait commencé par : « Les filles, comment faire pour partir en expé sans prendre l’avion ? ». Puis, « ben c’est simple, on reste en France dans un massif sauvage qu’on ne connaît pas, et on relie tous les sommets à pied pour une immersion totale ». Et c’est ainsi que notre projet de traverser à pieds les Pyrénées était né ! Avec une conviction supplémentaire : « Ne partons pas trop tard dans la saison, afin d’être sûres d’avoir un peu de neige et de pouvoir faire du mixte ». (Spoiler: on a été plus que servies).

Durant 6 mois, nous avons décortiqué les topos, les cartes, appelé les refuges, réalisé des visios tous les lundis soirs, calculé les distances et les dénivelés, réalisé des multitudes de tableaux excel.. Notre projet des Pyrénées a occupé toutes nos réflexions, nos journées, nos nuits, quitte à même fatiguer nos familles et amis. 

Et c’est ainsi que nous avons rêvé du Pic Du Midi d’Ossau, du Balaïtous ou du Vignemale.

Mais évidemment, rien ne s’est passé comme prévu…

Quelques jours avant de partir, la montagne nous a rappelé une leçon que nous étions censées avoir déjà bien intégrée : c’est la météo qui décide !! Allez comprendre, alors que l’hiver s’est montré radin en chutes de neige, il semble que nous ayons choisi le seul massif où la neige tombe à gogo !! Déçues, dépitées mais optimistes, une partie de la team prend quand même la direction des Pyrénées : nous décidons de nous rapatrier à Mallos de Riglos au nord de l’Espagne, afin de temporiser, en attendant le retour du beau temps en mangeant des tortillas matin, midi et soir. L’autre partie de l’équipe se réfugie dans les calanques de Cassis, seul lieu en France où la pluie ne coule pas. 

Durant 12 jours, nous avons attendu que les conditions en montagne s’améliorent, mais chaque jour c’est le même constat : la neige n’en finit pas de tomber, les refuges ferment les uns après les autres et personne ne met le bout d’un orteil en haute montagne… L’apprentissage continue : frustration, déception, tristesse, gestion de groupe, mais ces émotions nous encouragent à nous adapter, à rebondir, à revoir nos projections. Heureusement notre salle d’attente espagnole est plutôt sympa : nous grimpons tous les jours sur ces magnifiques piliers oranges qui nous donnent l’impression d’être dans le Colorado. A Mallos de Riglos, nous révisons nos automatismes en grande voie, et les jours où nous n’en avons pas eu assez, nous complétons avec des footings, histoire de garder la forme pour le moment tant attendu où on pourra retourner en montagne. Une fois nos doigts poncés sur les agglomérats de Riglos, nous traçons notre route vers Mont-Rebei, histoire de retourner sur du terrain montagne, poser des coinceurs et explorer les jolies arêtes du massif.

  Los mallos de Riglos, a mi me gusta España- © GFHM

On monte et on patauge avec vue sur la couronne impériale Suisse- © GFHM

  On monte et on patauge avec vue sur la couronne impériale Suisse- © GFHM

Après des jours à espérer mettre les pieds dans les Pyrénées, une décision collective est prise : la météo et les conditions ne nous permettront définitivement pas d’y aller. Nous changeons radicalement de plan et nous rejoignons alors nos guides Seb Escande et Begoña Lazpita et le reste de l’équipe en Suisse, dans le Valais avec un départ depuis Zinal.

Nous nous installons alors pour 4 jours dans la cabane du grand Mountet face à d’énormes montagnes dont les noms finissent tous en “horn” et qui nous font beaucoup rêver : le Zinalrothorn, l’Ober Gabelhorn.. Mais cette fois-ci, on a d’autres plans car en Suisse aussi il est tombé étonnamment beaucoup de neige pour la saison.

La montée au refuge est déjà très compliquée, il y a beaucoup de neige et on s’enfonce énormément, et, sans les snows-plaks de Seb, on n’aurait probablement pas réussi à monter à la cabane qui culmine à presque 3OOO mètres. 

Nous sommes très heureuses de nous retrouver une dernière fois au complet pour cette dernière aventure GFHM, et après ces dernières semaines de questionnements et d’incertitudes, nous sommes soulagées de pouvoir enfin aller en haute montagne sous la supervision de nos guides.

La première sortie est consacrée à l’arête du Blanc de Moming qui nous amènera jusqu’au dôme du même nom. Ce fut une magnifique course en neige qui nous permit de nous acclimater un peu plus à l’altitude, de découvrir les conditions et d’observer les itinéraires possibles pour les jours futurs. Nous déambulons sur cette arête comme des funambules, un pas devant l’autre, les yeux rivés sur nos pieds, encordées très courtes prêtes à sauter de l’autre côté comme on l’a bien appris. 

Le paysage est époustouflant, les sommets voisins sont majestueux, le soleil se cache et ressort entre les nuages, l’ambiance est mystique, et nous sommes seules au monde et réalisons nos traces. Ce fut une course entièrement dans la neige, où les snow-plaks nous auront encore bien sauvées.

Le soir au refuge c’est toujours le même rituel : on fait fondre la neige pendant des heures, on boit des litres de tisane, on est obsédés par la bouffe : à 17 heures on commence déjà par piocher dans tous les lyophilisés des copines et à 18h30 on tape dans les derniers bouts de chocolats, histoire de repousser le dodo de 20 heures. Évidemment, à 3000 mètres, et qui plus est, la veille d’une course, on ne dort pas vraiment, on se repose. Et à 3h du mat, hop hop tout le monde est debout et avec le sourire (on essaie). 

Arête Nord du Zinalrothorn depuis le Blanc de Moming- © GFHM

Notre dernière grande course est consacrée à l’arête du Besso. L’approche est déjà éreintante, avec cette neige lourde et toujours cette absence de regel. Puis, avec joie, nous passons enfin en conditions mixtes, et nous troquons nos snow-plaks contre le combo gagnant crampon-piolet. Et enfin, nous pénétrons sur cette majestueuse arête qui nous paraît alors très vite infinie.

Nous sommes heureuses de toucher le rocher, de grimper et d’avancer lentement mais sûrement sur cette arête. Pour limiter l’inertie de groupe, nous nous séparons en 2 pour le début de l’arête. Le rocher est splendide et les paysages sont fous. C’est l’occasion pour nous de revoir tous nos automatismes : les encordements, longs et courts selon le terrain, revoir les nœuds et en apprendre des nouveaux avec Bego qui nous encadre cette semaine pour la première fois, choisir parmi plusieurs façons d’assurer, mettre en place rapidement des rappels, être efficace de façon générale, bien gérer sa nourriture et son hydratation.. Cette course est aussi un bon prétexte pour faire le point sur nos compétences acquises durant ces 2 dernières années et d’améliorer sur nos lacunes.

En début d’après-midi, le constat est sans appel : nous avançons trop lentement, nous sommes en retard par rapport à nos estimations d’horaire et l’arête n’est pas en bonne condition pour continuer. Assez rapidement, il faut organiser une redescente par un autre biais. Nous sommes déjà en action depuis plus de 10 heures et la fatigue physique et morale commence à se faire sentir. Bien que nous sachions que ce serait une longue journée et une course sérieuse, nous n’étions pas toutes préparées psychologiquement à passer tant de temps sur cette arête.  Leçon numéro 657…

La désescalade de l’arête n’est pas confortable : entre le risque de chutes, la neige qui est très lourde, l’inertie de groupe et la fatigue générale, nous tentons malgré tout de rester bien concentrées.

C’est à 21h, que nous retrouvons notre petite cabane, après 17 longues heures de course, marquées par des doutes, des interrogations, des pleurs, des rires, de l’apprentissages, des vomitos, des sourires échangés, des pipis perchés, de l’entraide,  bref, tout ce qui fait que nous aimons toutes aller en montagne malgré les difficultés parfois ressenties.

Arête mixte pour monter au Besso- © GFHM

Et c’est ainsi, que nous avons clôturé cette « expédition suisse » , avec un dernier debrief pour comprendre et ingérer tout ce qui s’était passé la haut. 

Le lendemain, nous avons remercié nos guides pour cette nouvelle aventure très riche, pour leur patience, leur générosité, leur bienveillance et leur professionnalisme.

L’aventure GFHM s’achève ici pour nous. Nous laissons officiellement la main à la nouvelle promo à qui on souhaite de beaux moments riches en apprentissage et en amitié.

L’aventure humaine et montagnarde continue pour nous : grâce à cette formation de qualité nous nous sentons en confiance pour explorer les montagnes en sécurité avec nos nouvelles copines de cordée.

Nous remercions chaleureusement nos sponsors qui nous ont accompagnés durant ces 2 années : Millet, Petzl, FFCAM, Uriage et ceux qui nous ont rejoint pour l’expédition : Snell, Mecamontage et ECS.

Merci à nos 2 guides Seb Escande et Max Fiorani de nous avoir transmis un peu de leur savoir et d’avoir été si patients avec nous, et merci à Begoña d’avoir rejoint l’équipe pour la dernière aventure.

Et enfin, un merci tout particulier à nos deux mamans-organisatrices Séverine et Lara : leur disponibilité, leur patience et leur énergie rendent cette aventure possible et quel plaisir de les appeler au retour des courses pour tout leur raconter !!!

L’aventure continue !

Team GFHM sur fond de Dent Blanche – © GFHM

De gauche à droite: Charlotte, Adeline, Maria, Lucille, Elodie, Sophie, Cyrielle et Vanessa

2 commentaires sur « Expédition Pyrénées – Ou pas »

  1. Merci pour le récit!! Vraiment pas simple d’organiser un projet en autonomie à 8, bien désolée pour vous que vous ayez du abandonner votre beau plan pyrénéen… En tout cas, tous ces changements de plans et ces conditions difficiles n’ont pas du être facile à digérer, bravo pour votre transparence 🙂

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  2. Merci pour le récit!! Vraiment pas simple d’organiser un projet en autonomie à 8, bien désolée pour vous que vous ayez du abandonner votre beau plan pyrénéen… En tout cas, tous ces changements de plans et ces conditions difficiles n’ont pas du être facile à digérer, bravo pour votre transparence 🙂

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